
L'origine des Capsules Toulonnaises, c'est un peu comme :
- le premier album d'un artiste qui veut faire des chansons à texte mais à qui son agent conseille d'insérer des rythmes électro, histoire de "percer".
- les premières collections trop politiquement correctes d'un jeune couturier qui reprend une maison parisienne.
- la carte d'un restaurant qui change de propriétaire tout en restant dans la même famille. Le fils du patron veut garder les terrines de chevreuil, son nouveau commis lève les yeux au ciel.
Le point commun ? Ce ne sont que des hommes dans les exemples cités ?
Donc c'est un homme à la tête du projet ?
Oui, certes.
Mais pas que.
Le trait commun, c'est une idée qui cherche à réconcilier passé et présent et qui bute, cherche, hésite puis finalement trouve la force de faire différemment.
Un projet qui veut d'abord trouver son public et qui suit les recettes pensées comme étant efficaces.
Puis qui s'en éloigne pour privilégier la qualité à la quantité.
Je me présente. Ce sera plus simple.
Je suis Mathieu Giuliano, trente ans, Toulonnais depuis plus de quinze, des grands-parents Toulonnais depuis plus de soixante-dix.
Tour à tour chargé de projet culturel, étudiant en psychanalyse, écrivain, acteur, créateur de sites Internet, communicant.
Un mélange éclectique constitué au gré des rencontres, des villes traversées, des portes ouvertes.
En 2014, une idée a germé dans mon esprit : pourquoi ne pas proposer des Capsules Littéraires, présentées comme une publicité pour un médicament. Vous savez, avec la petite voix qui parle très vite tout en étant parfaitement articulée, pour annoncer la posologie.
Il se serait agi de présenter un ouvrage en deux minutes, en résumant l'action et en donnant nombre de pages et édition comme palliatifs au Prozac.
Je ne connaissais pas bien la bibliothérapie mais les années à lire m'avaient conduit à cette intuition.
L'idée est restée dans un coin.
Puis est revenue en 2018.
La solution idéale consistait peut-être à élargir le cercle des contenus aux autres domaines culturels que la littérature tout en choisissant un périmètre d'action.
Ce serait Toulon.
La première version naissait.
Des capsules à lire de deux minutes, scindées en deux : la "préparation" où je présentais les contextes quotidiens et banals de ma vie toulonnaise, au coeur desquels la rencontre culturelle avait eu lieu, pour dédramatiser, casser le pré-requis d'élitisme. Puis la "présentation" de l'oeuvre, de l'artiste.
Succès d'estime. Les personnes mises en valeur sont touchées.
L'humoriste Sandrine Sarroche (la famille de pâtissiers toulonnais) trouve notamment le concept intéressant et me propose d'en parler dans une de ses chroniques télévisées.
Mais je me sens à l'étroit, pas vraiment en phase avec mon impulsion initiale.
Je remanie la forme, en arrive à réfléchir à la polysémie du mot "capsule".
J'avais pensé médicament, certes mais encore.
Brainstorming.
La deuxième version pointait le bout de son nez.
Lancement début 2020.
Quatre capsules à lire et à écouter, autour d'un lieu toulonnais.
La capsule de cappuccino : des anecdotes pour se détendre, avec la gouaille de ma grand-mère Fernande
La capsule d'homéopathie : un article de fond pour se faire du bien aux méninges
La capsules médoc' : une bonne adresse / un artiste pour retrouver la pêche
La capsule spatiale : de la littérature pour voyager.
Les dizaines d'écoutes de podcasts s'enchainent.
Je joue alors le jeu de la communication culturelle, là encore, pas vraiment en accord avec ma volonté première mais faut ce qu'il faut.
Page Facebook, teasings et tutti quanti.
Les projets de collaboration arrivent.
Le COVID aussi.
Stupeurs et Tremblements.
Et la petite musique "jamais deux sans trois".
Que faire ? Quelle viabilité économique ?
Comment partir à la rencontre des artistes, des commerçants en étant confinés ?
Et sans tomber dans le tout numérique, réunions Zoom et vidéos YouTube.
Je profite alors de ce moment d'arrêt pour peaufiner encore.
Comme Coco Chanel qui disait qu'il fallait savoir en mettre trop sur le mannequin pour enlever juste ce qu'il fallait après coup.
Comme le chanteur qui oublie les synthés et la couverture des Inrocks pour écrire ses chansons poétiques.
Comme le chef qui garde la terrine de chevreuil mais la présente avec une émulsion de mâche.
Je décide alors de renoncer à deux choses.
Je renonce à l'idée de toucher le public en acceptant le jeu des réseaux sociaux, sans pouvoir discerner la qualité des contenus, obsédé par le nombre de likes et les ficelles de com à utiliser pour manoeuvrer.
Non, ce sera -presque- à l'ancienne.
Un site Internet, des podcasts oui, bonjour la modernité.
Mais le bouche-à-oreille, la carte de visite avec l'adresse du site que l'on se prête comme on se donne l'adresse d'un bon caviste ou le catalogue d'une exposition intéressante.
Veiller à ma liberté de ton, à l'indépendance des Capsules et refuser de transiger pour paraître plus vendeur.
Dans la même veine, renoncer à masquer ce qui m'intéresse.
Mettre en valeur la littérature comme un réel médicament, en lui associant la capsule médoc' ; exprimer clairement les repères historiques et patrimoniaux en les liant à la capsule spatiale, comme autant de voyages dans le temps.
Car c'est bien ça, l'ADN des Capsules : insuffler de la modernité dans la perception du passé mais pas au prix du pas de côté. Utiliser la modernité et ses outils oui, mais pas pour déformer le passé, le rétrécir à la portée des filtres présentés comme absolument nécessaires.
Interroger le temps et refuser la démarche patrimoniale poussiéreuse mais sans contraindre l'histoire à suivre la marche accélérée et parfois frénétique de nos temps actuels.
Lancement de la troisième version : décembre 2020